L\'Insoluble

L\'Insoluble

Gento

Ce n'était pas évident de cacher un cadavre qui n'existait pas. Surtout près de la ferme, en plein vent, dans le vent déchirant de décembre qui coupait la gorge. Au dessus de la Gente, et tout en haut du haut plateau, un bosquet de pins torturés levait des branches de théâtre, et il faisait si froid. Elle se souviendrait longtemps de la forme même des pierres, et des génévriers. Comme il fallait être si prudente quand on approchait des ruines, mais au moins en hiver il n'y avait pas de serpents. Seulement les feuilles de métal des oliviers.

 Le livre continu des pierres était encore ouvert, elle ne savait pas au juste pourquoi elle s'était réfugiée ici, pourquoi elle n'arrivait jamais à s'approcher des proches, seulement des lointains. Pourquoi le journal sauvage écrit ici sur les portes aux côtés des cadrans solaires savait lui donner la protection dont elle avait besoin, alors que les autres ne savaient pas.


Elle dit : un jour un homme que j'aime plus que tout m'accompagnera ici, sur cette terre.


Regarde, voici qu'avec ce qui lui reste de force elle est montée jusqu'à la ferme et te dépose ainsi, au milieu des genévriers, avec le ciel pour couverture, jusqu'à ce que le monde finisse.


Puis elle dit : un jour l'âme qui part regardera son antre dans la terre et y verra vos deux sourires.

 
Et elle dit aussi : un jour tout cela n'aura plus d'importance, seulement une couche de plus de mouvement de vie et de semence, seulement les contours d'une argile lorsqu'elle prend la forme des chevaux, seulement moi il y a si longtemps, et toi qui chantes dans le journal des pierres, mon amour. 



05/12/2006
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